mercredi 24 juillet 2013

Une adaptation de Cyrano qui a revitalisé un classique avec panache et poésie


Zoe Nadal

Connaître l’histoire de Cyrano de Bergerac n’est pas une condition préalable pour tomber amoureux et bien profiter de cette adaptation sensationnelle de l’œuvre de Rostand. Réalisé en 2006 par Denis Podalydes pour la célèbre Comédie Française, ce classique raconte l’histoire de Cyrano, un poète et un épéiste qui s’éprend d’un amour bien réel pour Roxane, sa belle et intelligente cousine. Malgré son esprit, son charisme (et son nez anormalement long), Cyrano se trouve trop laid pour bien exprimer ses sentiments à Roxane. En revanche, il se résout à aider Christian, un beau soldat dans son régiment, afin d’obtenir l’affection de Roxane, en écrivant des lettres d’amour et de belle poésie pour  les lui envoyer.
            Même si c’est un classique qui est fréquemment mis en scène partout dans le monde, cette adaptation apporte une nouvelle vie à l’histoire. Podalydes, avec le concepteur du décor (Ruf) et celui des costumes (Lacroix), rendent cette histoire nouvelle et saisissent votre attention et votre cœur avec la panache, visible dans le décor et les costumes, et l’estime pour la poésie du 17e siècle. Ayant eu la chance de voir plusieurs adaptations de Cyrano, une de mes pièces préférées, je remarque que cette adaptation, en comparaison avec les autres, trouve et maintient l’équilibre entre l’esprit flamboyant de l’histoire et de Cyrano, et la poésie, la façon sensible avec laquelle Podalydes et les scénographes traitent et s’occupent de ce texte magnifique. Je vais commencer par montrer comment les scénographes ont « joué » avec la lustre et la romanticisme de la poésie dans cette adaptation et puis, je discuterai comment Podalydes et Vuillermoz (Cyrano) ont trouvé cette équilibre dans le texte et avec le personnage de Cyrano.
            On n’attendait rien d’autre que la perfection de la Comédie Française dans le cadre de décor. Eric Ruf, le scénographe, reste fidèle au texte et aux didascalies et ne rend pas cette adaptation trop moderne : il garde la pérennité de cette pièce, et conçoit le décor simple mais toujours impressionnant. Au début, la scène est un peu nue : d’un théâtre et d’une ville du 17siècle qui manque de la vivacité. Mais pendant que la pièce déroule, la scène devient de plus en plus extravagante. Dans la deuxième scène, par exemple, qui se passe dans la boulangerie de Ragueneau, on voit des montures qui tombent du ciel, couvertes de poêles, de grandes cuillères de soupe, et de baguettes qu’on peut presque sentir. Ceci continue tout au long de la pièce, avec le décor réaliste des barricades et du cloitre à la fin. Mais, on n’est pas inondé par l’extravagance. L’extravagance est présente mais traitée d’une façon sensible et sérieuse : on a pas d’extravagance juste parce qu’on peut l’avoir. Par exemple, quand Roxane s’enroule dans les paroles de Cyrano pendant la scène du balcon, Ruf l’a fait volé comme si elle était trop amoureuse qu’elle ne pouvait plus rester sur le sol! Oui, c’est extravagant, cet effet de voler sur scène. Mais, cela indique quelque chose de l’esprit de Roxane à ce moment. On voit comment les paroles, que nous public, écoutons avec elle, la touche fortement. Christian Lacroix trouve cet équilibre avec ses costumes, surtout avec les couleurs. Même si les costumes sont extravagants et fidèles au 17e siècle, Lacroix a bien choisi de mettre les citoyens dans les couleurs foncés et Cyrano dans un couleur plus vive : l’orange. Cette couleur sort de la masse et c’est en faisant cela que Lacroix veut insister sur le fait qu’il est « autre. »
            Podalydes a bien gardé la poésie du texte original. Il n’a rien changé pour le rendre plus moderne. Alors que le jeu des acteurs principaux était magnifique, surtout de Vuillermoz, notre Cyrano, la grande star du spectacle est la poésie. Les acteurs échangent les vers en alexandrin sans effort et le public ne peut pas s’empêcher d’anticiper la rime des phrases bien conçues. Dans « Cyrano », on a la poésie du texte mais aussi de Cyrano, lui-même : de ses lettres et de ses paroles, que Vuillermoz rend justice. Vuillermoz est un excellent acteur, parfaitement choisi par Podalydes pour jouer le rôle si connu de Cyrano.  Il a une grande puissance à la fois comique et dramatique, idéale pour ce héros magnifique. Avec ses yeux larges et expressifs et son soin attentif pour la langue et la poésie de cette pièce, Vuillermoz brise votre cœur en essayant d’obtenir l’amour de sa cousine, qui n’est pas amoureuse de lui. Il habite pleinement le personnage de Cyrano : il crée un personnage complexe qui peut passer rapidement du Cyrano grandiloquent et flamboyant au Cyrano romantique et chaleureux. On peut dire, donc, que Vuillermoz trouve l’équilibre de gusto et poésie dans son joue du rôle de Cyrano.
            Pendant les cinq actes de « Cyrano de Bergerac » nous sommes expédiés vers un monde et une histoire de tragédie, de comédie, de drame. C’est cet équilibre entre toutes ses formes qui fait de cette pièce un classique formidable. Cette adaptation, de plus, a bien réussi à trouver l’équilibre entre le panache et la poésie, la flamboyance et la sensibilité. Le décor et les costumes, comme Cyrano lui-même, avec leurs grandeurs et leurs couleurs, ont une sorte d’esprit qui rend cette adaptation à la fois vivace mais touchante. Podalydes, en gardant le texte originale et en choisissant Vuillermoz pour notre Cyrano, trouve l’équilibre entre la poésie et les personnages comme des choses à la fois théâtrales, mais aussi belles, expressives et subtiles.


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